Du château et des défenses de Bar-sur-Seine à l’époque médiévale, à défaut de fouilles archéologiques, on ne sait finalement que peu de choses; les sources écrites sont tardives, datant essentiellement de l’époque bourguignonne, et relativement rares.
Carte postale ancienne des restes de l'ancien château des comtes de Bar ; à droite, nous apercevons un puissant contrefort dont il subsiste encore la base (collection personnelle).
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Les études, parfois les plus récentes à ce sujet, se contentent souvent de reprendre ce que des "historiens romantiques" du XIXe siècle avaient avancé, et tout particulièrement Lucien Coutant [1], avec bien des contradictions et des erreurs. Les premières descriptions et représentations sont de la fin du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle, alors que le château était en partie démantelé. À cette époque, les sources sont plus nombreuses et nous permettent de mieux comprendre comment s’organisait la défense de la cité. Le dernier siège qu’elle avait soutenu, avant ceux des Guerres de religion, datait de 1475. Depuis ce siège, le château avait été laissé à l’abandon et les fortifications de la ville peu entretenues, ne présentant plus, avec le retour du comté dans la couronne de France, la place stratégique qu'elle avait eu précédemment entre Champagne et Bourgogne.
Une position stratégique sur la vallée de la Seine
Bar-sur-Seine est placée dans un site de passage stratégique. La Seine prend sa source à près de 80 km au sud, sur le plateau de Langres, avant de traverser le Châtillonnais et d'entrer dans la Côte des Bars au niveau du Mont Lassois (Vix). Se frayant une vallée dans le plateau, la Seine rencontre la résistance de l'armature calcaire du Portlandien qui l'oblige à rétrécir sa vallée avant de s'ouvrir largement dans la Champagne Humide. C'est dans ce rétrécissement, juste avant cet élargissement, que Bar-Sur-Seine est née, protégée à l’ouest par un versant de vallée abrupt et à l’est par la rivière, ce dispositif donnant son nom à la ville : la "barre" sur la Seine.
La Seine est une réelle défense sur toute la longueur est de la ville. Les événements de l’hiver 1591 en témoignent, lorsque la rivière gela. Jacques Carorguy rapporte le fait dans ses mémoires :
…toute la riviere de Seine fut
tellement gelée et glacée, et, dez le premier jour de janvier, que chascun y
passoit fort à son ayse. Et de peur d’encourir fortune par cest endroict là,
tous les habitans ou la plus grand part se meirent à rompre en morceaulx
ladicte glace avec des coignees et aultres engins propres à ce faire, tant que
lesdicts glasons s’en alerent tous à val l’eaue et en fusmes delivrez des
menasses de ceulx de Chaource par ce moyen là [2].
La Seine gelée, la ville devenait vulnérable sur toute cette
partie.
Bar-sur-Seine est encore un site stratégique posé à l'aval de confluences successives ; plus au sud, le fleuve grossit de la Laignes (à Polisy), de l'Ource (à Villeneuve) et de l'Arce (à Merrey), petites vallées qui ouvrent des voies naturelles vers le Barsuraubois, pour l'Arce, et la Bourgogne en plus de la Seine (pour l'Ource et la Laignes).
De fait, depuis les premiers temps historiques, sinon protohistoriques, la Seine constitue un axe de circulation important, comme l’attestent les découvertes archéologiques dont les plus remarquables sont celles de Vix, au Sud, et celles de Lavau, au Nord. La ville occupe une position clé sur cette route, la contrôlant au rétrécissement de la vallée. Elle s’est développée au carrefour d’un axe principal sud-nord, déjà emprunté par les Grecs sur la route de l'étain, qui suit la vallée de la Seine, et au-delà relie le Bassin Parisien au Sillon Rhodanien (Manche/Mer Méditerranée), et d’une route qui vient de l’est, de l’autre côté de la Seine, en passant à l'époque par le Val Puisard, de Vendeuvre-sur-Barse et Brienne-le-Château. Ces routes forment les deux principales rues de Bar-sur-Seine : la « Grande Rue » et la « rue du Pont ».
Une ville dominée et contrôlée par le château comtal
Le plan montre bien comment le château domine parfaitement la ville primitive qui s’est développée autour de ce carrefour, le « bourg sous chastel » et autour de l’église et du prieuré, le quartier appelé « Bourg de la Trinité ».
Le donjon et plus tard la Tour de l’Horloge (qui n’existait pas encore au XIIIe siècle), dominaient la rue des Fossés. Elle était la limite sud de cette ville primitive, défendue seulement d'un fossé et de palis, selon les textes de l'époque.
Au milieu de la muraille est du château, deux tours rapprochées engagée dans le mur surplombent la rue du Pont et surveillent la place du marché au blé. Il en reste les ruines encore bien visibles.
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Le château occupe le site sur le modèle d'un « éperon barré » : il épouse un éperon naturel détaché du versant de la vallée,
ayant une très forte pente à l’ouest, creusée par un vallon sec ("la Voie Creuse"), et plus forte
encore à l’est, surplombant la vallée de la Seine. Le côté sud du triangle, qui le rattache
au plateau, est protégé par un grand fossé sec d'une vingtaine de mètres creusé dans la roche (et plus tard d'une basse-cour) qui était
surmonté par le point culminant de cet éperon rocheux (appelé "motte" par les auteurs anciens) sur lequel a été bâtie une puissante muraille avec une tour d’angle à chaque extrêmité et dominée en son centre par un donjon quadrangulaire, dont on ignore la hauteur,
élevé sans doute dès le XIIe siècle sur la partie la plus haute de cet éperon. Ce donjon est appelé la « Tour au Lyon[3] » par des textes anciens. Alphose Roserot nous apprend que des fouilles avaient été réalisées dans les années 1860 et les assises du donjon avaient été retrouvées. Son plan, selon Roserot, est rectangulaire de 25 mètres sur les côtés ouest et est, et de 20 mètres sur les côtés nord et sud. Les comptes des Ducs de Bourgogne évoquent que dès leur entrée en possession du château, en 1424, sont réalisés des travaux importants, en particulier pour rechausser le mur allant du donjon, depuis la poterne, jusqu'au mur de la ville[10].
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Au cours des XIVe et XVe siècles, le côté sud du château est renforcé d'une basse-cour quadrangulaire dont il reste encore des traces dans les bois. Jean de l'Auxerrois, à la fin du XVIe siècle ou au début du XVIIe, repris par le P. Nicolas Vignier, la décrit ainsi :
La bassecourt du chasteau, toute quarrée, ayant de chaque face quatre-vingts pas, paroissoit une seconde forteresse, estant environnée de long fossez, creusez dans la roche, comme ceux du chasteau, de son costé...[5]
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Que reste-t-il de ce château médiéval ? Des ruines, des restes de murailles et de tours sont encore visibles et permettent de dresser grossièrement un plan. La Tour de l’Horloge est une reconstruction d’après-guerre, inaugurée en 1948, à la suite de son dynamitage par les nazis le 5 août 1944, elle surmonte la première porte de l'espace fortifié, donnant accès tant à l'enceinte de la ville qu'à la seconde porte, entrée véritable du château, un peu plus au nord, après un gros contrefort. Le passage entre les deux porte était sous la surveillance d'une salle qui le dominait, placée au-dessus de la "Salle Basse", et dont subsiste une archère. Ainsi, les personnes passant par la porte sous la Tour de l'Horloge se trouvaient exposées aux tirs de cette archère, placée dans la muraille de la véritable "Salle des Gardes", hypothèse que l'on peut déduire des récits de Jacques Carorguy.
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La "Salle Basse", imaginaire
La « Salle Basse » a fait couler d’encre, appelée par-ailleurs et de façon éronée « Salle des Gardes ». Quel aurait été l'intérêt, comme nous venons de le voir, d'une salle des gardes souterraine et de laquelle on ne pouvait rien surveiller et garder, nécessitant par ailleurs de gravir des marches pour en sortir.
Les vestiges de la "Salle Basse", ainsi que les murs dans son prolongement, sont inscrits à l’Inventaire des Monuments Historiques (arrêté du 7 mai 1982). Son aspect souterrain a depuis longtemps nourri l'imagination et les fantasmes de nombreux Barséquanais, alimentés par l’un des premiers à nous la décrire, Lucien Coutant. La chronologie de cette « découverte » nous permet de comprendre la place de ses publications dans la construction de cet imaginaire romantique.
Lucien Coutant, dans un premier article de l'Almanach de Bar-Sur-Seine de 1848[6] ne fait allusion à aucune salle. Si elle avait été connue, il n'aurait pas manqué de l'évoquer. Aussi elle n’est pas encore découverte. La mention de la salle apparaît quatre ans plus tard, dans un récit romancé de l'Almanach de Bar-Sur-Seine de 1852[7]. Cet article évoque la prise de Bar-Sur-Seine par le sire de Praslin en avril 1591, récit très romancé. Le maréchal, d'après Coutant, venait de s'emparer du château. Il poursuit son récit ainsi :
Le maréchal fit assembler ses officiers, et les conduisant à travers de vastes galeries souterraines, pénétra dans une grande salle carrée voûtée en ogive et n'ayant d'autre ouverture que la porte y donnant entrée. Une lampe pendue à la clé de voûte éclairait seule cette sombre demeure (... ). C'était la salle des délibérations secrètes. Un jeune officier ligueur, tandis que ses compagnons se font massacrer, aurait décidé de trahir pour avoir la vie sauve. Et traversant les mêmes galeries souterraines (...), l'officier pénétra dans un petit cachot carré et, frappant une large dalle du pied : « Faites lever ceci, monseigneur, et dans un instant vous serez au milieu de la ville... ». On leva la dalle et un bel escalier de pierre s'offrit à la vue du maréchal. « - Où conduit cette galerie ? demanda ce dernier. - Dans le couvent de la Trinité, monseigneur ».
Il est certain que de part la topographie des lieux, ce
récit ne peut être qu’imaginaire cependant, tous les ingrédients étaient en
place ; ils allaient nourrir l'imaginaire collectif des Barséquanais
pendant plus d'un demi-siècle, entretenir le secret et le mystère de la salle.
Lucien Coutant, revient sur la découverte et la description de cette salle dans Histoire de la ville et de l'ancien comté de Bar-Sur-Seine[8] :
Tout récemment, dans la vigne qui occupe le plateau du château, a été découvert un souterrain qui formait une vaste pièce carrée, n'ayant d'autre issue qu'une seule ouverture ; elle communique à un corridor dont les éboulements n'ont pas permis de juger de l'étendue ni des dispositions. M. Gayot, de Bar-Sur-Seine, en avait commencé le déblaiement qui fut abandonné. Cette pièce n'était-elle pas la salle des délibérations secrètes ? Peut-être était-elle le lieu de détention des prisonniers de distinction.
Elle est voûtée en ogive et reçoit des quatre angles des nervures prismatiques ; la hauteur sous clef est de six mètres environ. Au milieu de la voûte se voit encore un anneau qui a dû servir à soutenir une lampe. Ce souterrain, entièrement recouvert aujourd'hui, paraît une construction du XIIIe siècle, époque à laquelle Milon IV fit construire la Tour du Lion.
Ainsi la découverte de la salle semble avoir été faite entre
1848 et 1852. Coutant n'y trouve qu'une seule porte mais elle est bloquée par
des éboulements.
Alphonse Roserot dans le Dictionnaire Historique de la Champagne Méridionale des origines à 1790[9] fait une description plus complète de la salle, qu'il appelle « salle du donjon » :
mur épais de 2 m. 50. Plan à peu près carré, 5 m. 20, de l'est à l'ouest, et 5 m. 30, du sud au nord. Voûte haute de 5 m. 30, construite sur ogive et sans formerets. Porte primitive, au nord large de 1 m. 30., haute de 1 m. 70, le linteau soutenu par deux modillons. De cette porte on descendait dans la salle par un escalier.
En 1942, si on suit bien Roserot, la porte sud est percée ; c’est celle par laquelle on pénètre dans la "Salle Basse" actuellement. Cette entrée figure aussi dans des relevés faits par Pierre Piétresson de Saint-Aubin[11]. Ainsi, il semblerait qu'elle eût été créée entre les années 1860 et 1880. Elle figure sur une impression sur verre datant de cette décennie (voir ci-dessous). Dans le même temps on a dû percer le mur ouest de la salle.
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Dans ses relevés, Pierre Piétresson de Saint-Aubin lève le plan et donne les mesures précises de la salle, qu’il nomme « caveau ». Il nomme par ailleurs le percement du mur ouest, dont on a grossièrement maçonné une porte, « petite galerie ». Il apparaît cependant qu’il ne s’agit nullement d’une structure originale, mais d'un percement de la muraille afin de procéder à un sondage à la recherche d’une de ces éventuelles « galeries » mentionnées par Coutant. Le terrassier s'étant heurté à la roche a cessé la prospection. On aurait alors remonté le mur ouest et maçonné l'ouverture actuelle donnant sur la galerie creusée et remblayée de gravats et de pierrailles. La nature des pierres de cette "porte" et du mur remonté, et leur taille montre en effet qu'elles ne sont pas d'origine et qu'elles sont bien postérieures au reste de l'appareillage.
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L'appareillage du mur entourant la porte et la porte elle-même montre que ce travail n'est pas d'origine mais est bien plus tardif, une reconstruction consilidation. Photo : Jacky Provence (1994) |
Une salle du début XIIIe siècle
La voûte d'ogive est une innovation technique de l'époque romane. On la trouve dès le XIe siècle en Italie du Nord et dans le domaine anglo-normand. L’un des premiers grands exemples est la cathédrale de Durham, en Angleterre. En Champagne méridionale, les voûtes d'ogives au XIIe siècle sont rares. L'hémicycle d'Isle-Aumont présente deux bandeaux plats, sortes « d'ogives-ancêtres » qui semblent remplir un objectif ornemental tout en renforçant le cul-de-four. C'est à la fin de XIIe et au début du XIIIe siècle que la voûte d'ogive fait réellement sont apparition en Champagne méridionale. A cette époque, les voûtes sont bombées et les ogives ne sont encore que de « gros boudins » ou des bandes plates. Ce n'est qu'au cours du XIIIe siècle que l'ogive devient un élément ornemental harmonieux et gracieux, avec pour exemple local l'église de Mussy-Sur-Seine. Nous avons ici ces références religieuses séculières grâce à la précieuse étude de Marguerite Beau[12].
A l’échelle régionale, d'autres exemples existent, en particulier dans le domaine régulier et plus précisément cistercien. Ainsi les forges de l'abbaye de Fontenay possèdent le même type d'ogives. Plus près de nous, le «Porterie» de l'abbaye de Claivaux, bâtiment qui donne l'accès à l'intérieur des anciens bâtiments conventuels, présente des nervures similaires : deux travées voûtées sur croisée d'ogives dont les nervures reposent sur des culots en forme de triangles renversés. Les nervures sont de section carrée mais largement chanfreinées sur les côtés. Elles sont séparées par deux larges arcs cintrés[13]. Ces voûtes tant des forges de Claivaux que de Fontenay sont datées de la fin du XIIe siècle. On les retrouve encore dans le logis abbatial de l'abbaye de Claivaux, dans le bâtiment des convers de Longuay (Haute-Marne) et plus tardivement dans les tours d'entrée du château de Saint-Dizier (sans doute construites vers 1210-1220).
D'autres exemples existent à Bar-Sur-Aube. Jean-Claude Czmara en a photographié plusieurs dans des celliers, datés de la fin du XIIe siècle ou du début de XIIIe siècle[14].Plus loin, des celliers avec des voûtes ayant le même type de nervures se trouvent à Reims.
Ainsi, il ne serait pas abusif de dater la salle basse du château du début du XIIIe siècle et même avant le départ de Milon IV en croisade en 1219. Des précédents existent tout d'abord dans le domaine religieux, puis dans le domaine militaire. Le style gothique qui en est à ses débuts ne devait pas être tout à fait étranger à Milon IV. Il avait hérité de la seigneurie du Puiset et de la vicomté de Chartres où il partageait ensuite son temps avec Bar-Sur-Seine[15]. La cathédrale de Chartres vit son achèvement en 1220, soit un an après le mort de Milon IV. Il en avait sans aucun doute fréquenté le chantier. Familier de Philippe Auguste, Milon IV accompagna le roi dans une expédition militaire en Normandie et participa au siège de Rouen en 1204. Il put encore se familiariser avec les modèles normands, premiers exemples de voûtes d'ogives sur le continent. Dans le même temps Philippe Auguste achevait la construction de nouvelles forteresses, dont le fameux Louvre (vers 1190-1202). Selon Michel Belotte, le comte de Bar-Sur-Seine aurait eu un grand-oncle évêque de Durham, berceau de la voûte d'ogive. Cependant rien ne peut nous permettre d'affirmer qu'il a traversé la Manche. Enfin, lors de son pèlerinage en Terre Sainte en 1211, a-t-il visité les chantiers des grandes forteresses qui devaient protéger les États Latins d'Orient, dont le fameux Krak des Chevaliers, et dans lesquelles étaient élaborés les systèmes défensifs les plus sophistiqués à l'époque, au contact des musulmans ?
Ainsi le comte Milon IV ne semble plus se contenter du vieux donjon quadrangulaire de ses prédécesseurs et semble vouloir imiter les plus grands, accroître d'une part les capacités défensives de sa demeure, symbole de sa puissance, arborant les armoiries familiales avec le Lyon, et d'autre part en augmenter les commodités afin de la rendre plus agréable.
La Salle Basse, réalité ?
La salle basse reste aujourd’hui le vestige le mieux conservé du château, sans doute le dernier témoin de ce que dût faire bâtir le comte Milon IV. Cependant, à l'époque, ce n'est qu'une modeste salle, sans ouvertures, en contrebas du reste du château, surmontée d’une autre salle et d’une petite tour, ces dernières disposées de façon à protéger les entrées du château. C'est une salle aménagée en sous-sols, blottie dans les fondations, entre des murs qui peuvent mesurer deux mètres cinquante d'épaisseur et la roche de l’éperon. Il fallait descendre un escalier pour y accéder. Tous les édifices locaux qui utilisent le même type de voûte sont des communs et des caves et non des pièces d'apparat ou de culte. Cette salle n'est pas une chapelle souterraine comme certains l'ont avancé, pas plus qu'une prison pour prisonniers de marque ou une salle de délibérations secrètes. Pour quoi faire, d’ailleurs ? Nous avons ici une image romantique et déformée du Moyen-âge. La réalité est bien plus simple. La salle basse est très certainement une cave ou un cellier dans lequel le seigneur pouvait entreposer des réserves.
Cul-de-lampes - ou culots - massifs témoignent de la simplicité d'exécution, réalisés de façon grossière sur lesquels retombent les ogives, comparés à ceux bien plus finement sculptés de la toute proche et peut-être contemporaine chapelle d'Avaleur ; la qualité architecturale y est sans commune mesure. Ceux de la salle basse sont composés de deux morceaux principaux, une partie inférieure arrondie et à facettes, le panier, une partie supérieure évasée aussi à facettes. Le contact entre les deux morceaux n'est pas parfait. Il a nécessité un calage plus ou moins important, très épais à l'angle sud-ouest et presque inexistant à l'angle sud-est. La partie inférieure est sans doute celle qui a le plus posé de problèmes au tailleur ; très proéminent à l'angle nord-est, il est beaucoup plus modeste à l'angle sud-est. On n'avait pas recherché la perfection pour ce qui ne devait être qu'un cellier ou tout au moins une salle modeste.
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Photos de la Salle Basse. Jacky Provence (1994) |
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La voûte est solide. Elle a résisté à l'effondrement de la tour et la courtine qui la surmontaient, visibles encore sur l’estampe de Joachim Duviert et encore en ruines dans d’anciennes photographies.
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Elle supportait plusieurs mètres de décombres ou remblais dégagés dans les années 2000, mettant à jour les bases de la salle des gardes avec archère qui défendait la première porte du château sous la Tour de l’Horloge que nous avons évoqué plus haut, au-dessus de la "Salle Basse". Le déblaiement de ces gravats ne s'est fait sans aucune règle de base par un groupe d'amateurs, les entassant un peu plus loin, en lesquels était mêlés tuilots et morceaux d'anciens enduits peints qu'il aurait pu être intéressant d'étudier quant à leur composition et leur datation. Plus grave, l'enthousiasme de ces amateurs les ont poussé à fouiller plus profond, ouvrant une brêche au-dessus de la salle dans laquelle aboutissait la galerie, salle où devait se trouver les escaliers qui descendaient à la salle basse, brèche qui allait d'année en année être agrandie menaçant même la stabilité de la salle basse et de la muraille Est, s'effondrant sur sa partie haute et comblant la galerie d'escalier.
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La galerie depuis la salle basse puis à l'autre bout. Les photos montrent bien les effondrements qui se sont faits après le dégagement de cette porte en 2003. Photo : Christophe Adam (2005) |
[1] Sur l’histoire
de Bar-sur-Seine, s’il faut privilégier un livre, c’est celui de Michel Belotte,
ouvrage de référence qui exploite en partie son travail de thèse : Histoire
de Bar-sur-Seine des origines à 1789, sorti en 2003.
[2] Le
Receul de Maistre Jacques Carorguy, greffier à Bar sur Seine, des choses les
plus memorables advenues en ce royaulme depuis l’an Vc quatre vingtz deulx
iusques en l’année Vc quatre vingtz
quinze, Médiathèque de Troyes, ms 2426, f° 39 r° ; édition du
manuscrit 2426 de la Médiathèque de l’Agglomération Troyenne publiée par Jacky
Provence, Paris, Honoré Champion, 2011, p.83.
[3] Faut-il
y voir un rapport avec les armoiries des comtes de Brienne (D'azur au lion d'or
armé et lampassé de gueules) qui furent au cours des XIe et XIIe siècles comtes
de Bar-sur-Seine, ce qui permettrait de dater le donjon de l’époque de ces
comtes ? C'est aussi l'argument que présente le P. Nicolas Vignier, tour qu'il dit être au-dessus de la Tour de l'Horloge, à l'extérieur de la muraille de la ville et à demi-démolie (
[4] Plaçant
la chapelle sous la protection de Jean-Baptiste, laquelle il dotait d’une très
précieuse relique qui serait le chef (entier) de ce saint (emportée par
les Huguenots lors de leur prise de la ville en 1562).
[5] B.N., ms fr. 5995, f° 11 r° et v°.
[6] « Le
château des comtes de Bar-Sur-Seine », p.176-181.
[7] « Une
nuit de noces », p.68-74.
[8] tome II,
p.294.
[9] Langres,
1942, tome I, p.130-131. A noter que la description du château par Alphonse Roserot fait de grosses confusions et erreurs dans l'orientation et la disposition de celui-ci et de la basse-cour.
[10] A.D.
Côte d'Or, B 3019, 2e compte.
[11]
Archiviste paléographe en 1917, il fut Directeur des services d'archives de
l'Aube de 1920 à 1930, puis du Nord. Est-ce pendant sa période
« auboise » qu’il dressa ces plans et dessins ? Ces relevés sont
conservés aux Archives départementales de l’Aube (12 J 30).