Jean Gailde, ou Guailde, maître-maçon, fut le maître d’œuvre du jubé de l’église Sainte-Madeleine de Troyes. Commencé en 1508, l’Évangile est lue depuis la tribune la veille de Noël 1512 ; il est officiellement inauguré le jour de Noël 1517.
Le jubé de Sainte-Madeleine est un chef d’œuvre de l’Art flamboyant. Il est formé trois arches de taille égale formant comme un pont aérien entre deux piliers massifs, masqués à l’intérieur de deux fausses tentures sculptées et peintes d’étoiles d’or sur fond vert. Les trois arcades sont ornées de festons trilobés se terminant en fruit d’arum.
Un jubé est un édifice de pierre ou de bois construit entre le chœur et la nef d’une église. Il tient son nom du premier mot de la formule latine « jube, domine, benedicere » (« daigne, Seigneur, me bénir ») qu'employait le lecteur avant les leçons de Matines.
Le jubé se compose de trois éléments : la tribune (le jubé proprement dit), la clôture (dite « chancel ») et le groupe sculpté de la crucifixion.
- De la tribune on lisait l'Évangile et on prêchait. On y installait aussi les chœurs ; un orgue portatif pouvait y être installé.
- La clôture, ou chancel, avait pour fonction d'isoler le chœur, réservé aux membres du clergé, des fidèles qui, du fait de sa présence voyaient peu ou pas du tout le maître-autel et par conséquent leur masquait le mystère de la consécration du pain et du vin
- La crucifixion surmonte la tribune dont elle est l'ornement principal, tourné vers les fidèles.
Au centre, les voûtes retombent portées par deux clefs pendantes semblant les suspendre dans le vide, et s’ancre aux extrémités sur les piliers.
Une clef pendante du jubé.
Les arcades sont encadrées de quatre dais flamboyants au-dessus de niches vides qui devaient être occupées par des statues posées sur des culots. Les dais se prolongent sur les piliers au niveau de l’architrave et de la balustrade par d’autres dais et des motifs flamboyants.
Côté chœur, des écus sont placés au-dessus des arcades.
Celui du centre porte les initiales « SM », pour Sainte Madeleine ; de chaque côté, figurent les armes de France surmontées d’une couronne.
Le dessous du jubé est constitué de petites voûtes à trois ogives séparées par des clefs pendantes.
Le jubé est couronné d’une corniche ornée de feuillages, surmontée d’une balustrade à fleurs de lys et à mouchettes, ajour au tracé asymétrique évoquant une flamme.
La balustrade supporte un ensemble de statues : au centre le Christ en croix en bois, à gauche Jean l’Évangéliste et à droite Marie.
Christ en Croix du Jubé de la Madeleine de Troyes.
Vierge au calvaire du jubé.
Au-dessus de chaque arcade, des cadres en forme de pentagone aux bords concaves contiennent des quadrilobes dans lesquels ont été sculptés des personnages. Dans celui du centre, Jésus Christ est représenté tourné vers le quadrilobe de gauche où deux femmes l’écoutent assises. Dans le dernier quadrilobe, deux hommes sont représentés dans la même attitude que les femmes. Les sculptures auraient été mutilées à la Révolution française et les têtes ont été refaites en plâtre, ce qui ne permet pas d’apprécier la qualité du travail de Nicolas Halins dit le Flamand, auteur de ces sculptures, les « les trois ymages en rondeaulx » qu’il réalisa en 1513.
Dans le pentagone aux côtés concaves : un relief de Nicolas Halins.
Pierre-Yves Le Pogam (musée du Louvre) donne une nouvelle interprétation à cet ensemble sculpté, au regard d’un passage dans les Évangiles de saint Luc (10, 38-42) et de saint Jean (12, 1-8). Il pourrait représenter le Christ demandant l’hospitalité à Marthe et Marie-Madeleine, deux sœurs. Les hommes, dans le quadrilobe de droite pourraient être Lazare et un apôtre, attendant le repas. Marthe préparerait le repas et Marie, écouterait le Christ, opposant vie active et vie contemplative. Cette interprétation est liée au vocable de l’église (Marie-Madeleine) ; par ailleurs, sur le pilier de droite qui fait face au jubé est placée la statue de sainte Marthe, rappelant ce lien avec Marie-Madeleine.
Le jubé côté chœur.
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